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Les fondamentaux libéraux en trois leçons (3/5)

« La France est depuis toujours un pays dirigiste que là est sa vocation millénaire, sa nature profonde, son identité culturelle. Cette qualité la distingue et la protège heureusement de la chienlit libérale et de la barbarie « anglo-saxonne ». De Colbert à De Gaulle, de Robespierre à Mitterrand, du jacobinisme au bonapartisme, du planisme au socialisme, à droite comme à gauche, nous adorons l’Etat et réclamons l’économie administrée. L’ennui c’est que cette version de notre histoire est une vaste blague.

Forgée au cours de la seconde moitié du 20ème siècle, elle sert à fabriquer des lettres de noblesse rétrospectives à la boulimie et à la mégalomanie des pouvoirs publics depuis 1945. La France serait l’ennemie du marché parce que colbertienne ? Ecoutons Colbert : « une entreprise qui est soutenue par l’Etat, si elle ne fait pas de bénéfices au bout de cinq ans, doit être abandonnée. Notre Etat contemporain a-t-il abandonné la SNCF, Air France, le Crédit Lyonnais et autres gouffres de la richesse nationale ? Non. Alors qu’il laisse Colbert tranquille. »

Ainsi Jean-François REVEL brossait-il le portrait politique de notre pays.

Trois leçons à tirer de l’histoire du libéralisme :

  • les grands précurseurs du libéralisme au 18ème siècle se trouvent en France autant et parfois plus qu’en Ecosse ou en Amérique (c’est notamment Turgot qui a influencé A Smith et l’américain Thomas Jefferson. Ce sont les physiocrates qui ont plaidé pour la liberté du commerce).
  • la 2ème leçon est que hormis la dictature jacobine (qui a duré 13 mois sur 10 ans ) la révolution française fut dans ses principes philosophiques et ses réformes du droit fondamentalement libérale : hostilité à la propriété collective, intransigeance sur la propriété individuelle, construction d’une œuvre législative balayant toutes les entraves corporatives et réglementaires de l’Ancien Régime pour établir sans équivoque et sans restriction la liberté d’entreprendre, du travail, de circulation des marchandises et la liberté bancaire. Le dirigisme montagnard – blocage des prix, confiscation des récoltes, laxisme monétaire – ne fut qu’une parenthèse qui se termina en disette et en banqueroute
  • troisième enseignement original : ce sont les libéraux du 19ème siècle qui ont les premiers posé la « question sociale » et y ont répondu par plusieurs lois fondatrices du droit social moderne : Frédéric Bastiat est le libéral qui a énoncé le principe du droit de grève en 1849 ; Emile Olivier contraignit Napoléon III d’abolir le délit de coalition ouvrant la voie au syndicalisme pur en 1864 ; et WaldecK-Rousseau fit voter la loi reconnaissant aux syndicats le statut de personnalité civile en 1884.

L’histoire nous le montre : il n’y a jamais eu de « libéralisme sauvage » (c’est même un oxymore), les grands pays libéraux sont aussi des Etat de droit – certes perfectibles – mais c’est chez eux, par exemple, que le syndicalisme est le plus fort.

Lecture de JF. Revel sur l’essai collectif dirigé par Alain Madelin « aux sources du modèle libéral français » (Perrin, 1998), in Le Point 24 janvier 1998.

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