La crise du CPE est riche d’enseignements : une fois de plus, le pouvoir de la rue se substitue au pouvoir démocratique. Il y a déjà eu des précédents destructeurs : le législateur avait déjà dû reculer en 1984 et 1986 à propos des réformes Savary et Devaquet, mais il s’agissait de projets de loi retirés avant d’être votés. En 1994 on montait d’un cran avec l’abandon du CIP par Edouard BALLADUR par la rédaction d’un simple décret d’application.
La cote d’alerte cette fois est dépassée : même après la décision du Conseil constitutionnel de valider la réforme du CPE, c’est-à-dire validant la procédure, la conformité au principe d’égalité devant la loi, le respect du droit à l’emploi et du droit au recours, les syndicats et l’opposition ne sont pas revenus sur leur exigence de retrait. Et Jacques CHIRAC devant la fronde lâchant son premier ministre et décidant de promulguer le texte tout en invitant les partenaires sociaux à ne pas l’appliquer et à négocier un nouveau texte avec la majorité, a préféré la paix civile à la rigueur républicaine et a fini de tuer la loi. Car si depuis le mot prononcé par François MITTERRAND pris d’ardeur marxiste sur « la force injuste de la loi », les assauts contre la loi se sont multipliés, ce dernier épisode signe un mépris de la légalité sans précédent. Et nous avons beaucoup à perdre à la bafouer car c’est elle qui fonde la légitimité de notre système démocratique et la responsabilité du pouvoir politique et qui nous protège de la rue et des groupes de pression. La loi affaiblie c’est l’Etat de droit qui s’effondre.