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Le Kosovo n’est pas le dernier conflit territorial dans les Balkans

L’éclatement de la Yougoslavie du roi Alexandre et de Tito a constitué l’une des plus extraordinaires régressions politiques contemporaines, d’autant plus qu’il eut lieu au moment même où s’édifiait l’Europe politique et monétaire du traité de Maastricht. L’histoire donnera raison aux rares intellectuels qui s’opposèrent à ces détestables replis identitaires balkaniques du début des année 1990, comme elle a déjà condamné les massacres commis au nom de la « pureté ethnique », dont le pire exemple reste celui de Srebrenica (juillet 1995). Jamais un désaccord politique, d’où qu’il vienne, ne pourra justifier un massacre.

En mars 1999, le président américain Clinton avait solennellement promis la constitution d’un « Kosovo multiethnique et pacifié », pour justifier le déclenchement, par l’Otan, d’une campagne aérienne de bombardements contre la Serbie. Aujourd’hui le Kosovo n’est ni multiethnique ni pacifié. Il n’est pas multiethnique parce que les soldats de l’Otan, qui remplacèrent les forces de sécurité serbes dans la province en juin 1999, se montrèrent incapables d’enrayer l’épuration ethnique contre les Non-Albanais. Il y avait à l’époque des dizaines de milliers de Serbes qui vivaient à Pristina, le chef-lieu de la province, ou à Pec, le siège du patriarcat de l’église orthodoxe serve depuis le XIIIe siècle. Quand à la pacification, c’est celle des clans mafieux et de leurs trafics en tous genres (drogue, prostitution forcée, etc.)

Mais il y a, dans les Balkans, plus grave encore que la simple question de la protection des derniers Serbes du Kosovo. En novembre 1989, les Occidentaux ont imprudemment laissé s’ouvrir la boîte de Pandore des revendications territoriales et des irrédentismes dans les Balkans. En novembre 1995, ils auraient pu la refermer, à l’occasion de la conférence internationale de Dayton, qui fit la paix en Bosnie. Mais par paresse et pusillanimité, les Américains et les Européens refusèrent, à Dayton, d’aborder d’autres problèmes que ceux de la Bosnie. La question de l’irrédentisme albanais est loin d’avoir été réglée. Que se passera-t-il le jour où les Albanais de Macédoine, qui sont très majoritaires à l’ouest de ce petit Etat créé en 1992, réclameront à leur tour indépendance ? Les Occidentaux clament à cors et à cris que l’indépendance du Kosovo, « processus sui generis », ne saurait créer un précédent dans les relations internationales : ils ne convainquent personne. Que se passera-t-il le jour où les Serbes de Bosnie, définitivement brouillés avec le gouvernement central de Sarajevo, réclameront à leur tout leur indépendance ? A l’évidence il faut une nouvelle conférence internationale sur les Balkans, afin d’inscrire dans le marbre des frontières définitives.

In Le Figaro, le 19/03/2008, par Renaud Girard.

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