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Décentralisation : sortir enfin de l’ambiguïté

Il ne s’agit pas seulement de décrire à l’emporte-pièce des mécaniques de fiscalité locale ou de péréquation, ou encore d’appeler à la sempiternelle clarification des compétences –expression induisant une relation de dépendance entre l’Etat et les collectivités locales-, mais, bien au-delà, de prendre position sur des principes essentiels de gouvernance d’un pays démocratique : les assemblées locales sont-elles porteuses comme l’Etat de la notion d’intérêt général ? Quelle est leur légitimité démocratique par rapport à l’Etat ? Devons-nous aller, en France, vers une forme de fédéralisme, en permettant l’adaptation des lois au contexte local ? Quelles relations –et dans quel cadre institutionnel- entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux ? Quelle répartition de la ressource fiscale entre les différents acteurs de la puissance publique ? Faute d’une réflexion approfondie et de prises de positions courageuses en ce domaine, la gouvernance du pays n’en sera aucunement améliorée et les mêmes erreurs se reproduiront à l’infini.

De tout cela, on ne parle pas dans l’actuel débat, ou si peu. Car la réponse décentralisatrice à la réforme de l’Etat fait peur à celui-ci et à ceux ou celles qui rêvent d’en devenir le chef.
En France, l’Etat a historiquement fait la nation. La République est venue ensuite. Les trois sont aujourd’hui confondus dans l’imaginaire collectif. De là vient la difficulté : beaucoup restent sincèrement convaincus que la puissance de l’Etat est la seule garantie de la survie des deux autres. Je pense exactement l’inverse. Oui, la République sera plus vigoureuse avec une organisation fédéraliste, lorsqu’elle s’incarnera davantage encore dans chaque assemblée locale. Oui, la nation constituera mieux encore notre cadre culturel de référence, lorsqu’elle considérera toute la diversité des territoires et des origines.
C’est toute la question des « corps intermédiaires » (organisations syndicales, collectivités locales, chambres consulaires, conseils consultatifs…) de notre société française qui est ainsi posée. Comment un pays moderne, complexe et sophistiqué, dont la population dispose d’un haut niveau d’éducation –et donc d’analyse critique-, peut-il espérer avancer sans s’appuyer sur ces acteurs du pays réel ? Comment ne pas imaginer utiliser pleinement leur expérience, leur savoir-faire, leur capacité à convaincre et les mettre au service d’une stratégie nationale auparavant concertée, sur la base d’un diagnostic partagé ? Comment ne pas comprendre qu’il y a là, sans aucun doute, la véritable réserve d’énergie dont aura besoin le ou la futur(e) président(e), à la condition de savoir la révéler et la mobiliser ?

By Philippe Laurent (maire de Sceaux) In Les Echos du 18 avril 2007

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