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Etat pré insurrectionnel (5) : le trauma colonial

Toujours en cette fin d’année 2005 explosive, en s’appuyant, pour permettre l’application du couvre-feu, sur la loi du 3 avril 1955 qui avait institué l’état d’urgence au début de la guerre d’Algérie, le gouvernement a mis en évidence le retour du refoulé colonial. En effet, le traumatisme de la guerre d’Algérie, longtemps enfoui à la faveur des années d’expansion, exerce des ravages de plus en plus insidieux dans la conscience nationale française et se manifeste aujourd’hui avec une violence sans précédent depuis les émeutes des Minguettes, de Vénissieux et Vaulx-en-Velin en juillet 1981.

En fait la République se sera trompée deux fois. Deux fois placée à contretemps : faute d’avoir su pratiquer le multiculturalisme en Algérie quand elle aurait dû le faire, elle voudrait le tenter sur son sol au risque de compromettre son unité. Les enfants de l’immigration maghrébine n’ont pas tant souffert du handicap de la langue ou de leur appartenance à l’islam, qui s’est réveillée par réaction, que d’une rapide et complète déculturation. La disparition des structures familiales qui les encadraient aurait dû être compensées par l’enseignement des codes et des valeurs de leur société d’accueil. Le malheur est que les établissements scolaires, dominés par l’idéologie de ceux qui avaient combattu la guerre d’Algérie, ont été assez largement paralysés par la culpabilité de la mémoire coloniale. De plus au sein d’une administration traumatisée par les déboires de l’expérience algérienne, on a cru de bonne foi que la prévention serait préférable à la sanction et que le respect des pratiques du pays d’origine serait un meilleur outil d’intégration que la stricte application des principes républicains. On a voulu éviter le conflit, on a fait le lit de l’insurrection. Le plan d’égalité des chances, de lutte contre les discriminations et d’urbanisation engagé depuis 4 ans va dans le bon sens. Mais l’échec des Zones d’Education Prioritaire en témoigne, ce plan ne pourra réussir que si l’on respecte les principes républicains d’égalité devant la loi et de laïcité qui sont les clés du développement.

« Banlieues : le trauma colonial », Alain-Gérard Slama, le Figaro, 14 novembre 2005

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